DU 16 AU 25 MAI
À LONDON, ON
L’or surprise
L�or surprise
Vincent Ethier

par Willy Palov pour la LCH

Parfois, une équipe dans l’ombre se positionne sous les feux de la rampe

Durant  une saison de la LHJMQ où toutes les discussions tournaient autour des meneurs, notamment le Drakkar de Baie-Comeau, les Moosheads de Halifax, l’Armada de Blainville-Boisbriand et l’Océanic de Rimouski, les Foreurs de Val-d’Or ont fait leur petit bonhomme de chemin discrètement, sous les radars. Ils auront quand même attiré l’attention en fin de parcours quand une poussée les a fait grimper au troisième rang du classement général. Malgré tout, ils n’ont jamais profité de plus qu’un statut d’aspirant de deuxième classe aux yeux de la plupart des observateurs.

« Nous avons réalisé un effort d’équipe », a indiqué l’entraîneur-chef de Val-d’Or Mario Durocher. « Je crois que plusieurs personnes parlaient souvent de différentes équipes et ces gens nous ont peut-être un peu oubliés. Nous n’avions aucun problème avec cette situation. Nous avons connu une très bonne première moitié de saison et nous avons bâti sur la confiance, puis nous avons mis nos gars au défi d’élever leur jeu d’un cran et d’être encore meilleurs, ce qu’ils ont fait. Nous avons commencé à travailler davantage en équipe et je crois que nous méritons tout ce qui nous arrive. Les gars l’ont bien mérité et je suis fier d’eux. »

La base des succès des Foreurs a été le jeu de leur noyau élite. Les défenseurs Randy Gazzola et Guillaume Gélinas ont été retenus au sein de la première équipe d’étoiles du circuit, le gardien Antoine Bibeau a régulièrement excellé et les vétérans attaquants Louick Marcotte et Samuel Henley ont marqué des buts opportuns et offert un leadership au club de l’Abitibi.

Le principal ingrédient a été l’ailier Anthony Mantha, champion marqueur de la ligue et membre de la première équipe d’étoiles. Il a marqué 57 buts et récolté 63 passes en 57 matchs pour déloger la super-étoile des Mooseheads Jonathan Drouin comme joueur par excellence du circuit. Il n’est pas surprenant que les Foreurs aient été l’équipe la plus productrice à l’attaque avec 306 buts en 68 matchs.

« Notre attaque est certainement notre point fort », affirme Mantha. « Nous avons marqué plusieurs buts depuis le début de l’année et nous n’avons pas cessé de produire. Peu croyaient en nous. Je crois que nous avons démontré que ces gens étaient dans l’erreur et que nous avions l’équipe pour réussir. »

Comme pour la plupart des équipes championnes, l’évolution des gagnants ne s’est pas faite du jour au lendemain. Les joueurs comme Mantha, Henley, Gélinas, Nicolas Aubé-Kubel, Anthony Richard, Julien Gauthier et Olivier Galipeau ont été de bons choix au Repêchage de la LHJMQ lors des dernières années et ces joueurs se sont développés pour devenir des éléments clés sous la direction du personnel d’entraîneurs de Val-d’Or. À l’exception de Mantha et de Gélinas, deux trouvailles de cinquième tour, tous ces joueurs ont été des choix de première ronde.

« Certains d’entre nous sont ensemble depuis longtemps et nous avons grandi à Val-d’Or », raconte Mantha, choix de première ronde des Red Wings de Detroit (20e au total) en 2013. « Nous avons établi une belle chimie durant tout ce temps  et c’est amusant pour nous de gagner ensemble aujourd’hui. »

D’autres pièces du casse-tête de cette conquête du championnat se sont ajoutées par voie de transactions opportunes. Les défenseurs Gazzola et Jeremie Fraser sont arrivés en 2012-2013, tout comme l’attaquant Pierre-Maxime Poudrier. Ce fut toutefois un trio d’échanges avec les Islanders de Charlottetown cette saison qui a mis la touche finale à l’alignement des Foreurs.

Il y a d’abord eu l’acquisition de Marcotte, un ailier de 19 ans qui a terminé au cinquième rang dans le circuit avec 100 points. Le deuxième de ces joueurs a été Bibeau à la fin décembre, suivi de Ryan Graves une semaine et demie plus tard. Bibeau a stabilisé la situation devant le filet, tandis que Graves a ajouté un gros défenseur mobile pour compléter leurs deux premiers duos.

« Quand ils ont décidé d’aller chercher certains joueurs avant la date limite des transactions aux Fêtes, cela nous a beaucoup aidés”, indique Mantha. « Le gardien a été incroyable et Graves a fait tout un travail. Nous savions que nous pouvions marquer des buts, mais le fait de marquer ces buts pour nous aider en défensive a fait la différence. »

Durocher affirme qu’il a décidé avec le directeur général Alexandre Rouleau d’y aller de ces quelques dernières transactions après une évaluation honnête la première moitié de saison de l’équipe. Les Foreurs ont aligné une séquence de huit victoires consécutives avant la pause des Fêtes pour créer de l’enthousiasme, mais les deux hommes n’étaient toujours pas convaincus qu’ils avaient tous les outils en main pour réussir un grand coup. Ils se sont alors tournés vers le marché, se mettant toutefois d’accord qu’ils ne se videraient pas les poches pour autant.

Ils ont ainsi dû sacrifier leur choix de première ronde en 2013, David Henley (le jeune frère de Samuel), pour acquérir Graves ainsi que trois choix au repêchage, notamment un choix de première ronde pour mettre la main sur Bibeau. Jamais par contre n’ont-ils senti qu’ils hypothéquaient leur avenir pour autant.

« Avant qu’Anthony Mantha ne parte pour les Mondiaux juniors, notre façon de jouer et la façon dont nos jeunes joueurs se comportaient nous ont conduits à adopter cette approche », raconte Durocher. « Nous n’avons pas donné d’occasion à notre DG de procéder à des transactions qui sacrifieraient notre avenir.  De la façon dont nous avons joué, nous lui avons démontré que nous avions la possibilité de faire un petit bout de chemin de plus que nous avions d’abord prévu.

« Je crois qu’il a été intelligent. Nous avons acquis Bibeau, puis Graves qui n’a que 18 ans. Nous avons déboursé beaucoup pour lui en nous défaisant de David Henley, mais je crois que toutes les transactions qu’Alex a réalisées ont été utiles. Nous sommes très heureux de la situation actuelle et l’avenir de l’organisation est aussi prometteur. »

Les résultats en séries éliminatoires obtenus contre les poids lourds du circuit ont clairement prouvé que leurs transactions ont porté du fruit. Non seulement les Foreurs ont renversé le Drakkar, champion du calendrier régulier lors de la finale, mais ils ont aussi éliminé les Mooseheads, champions en titre de la LHJMQ et de la coupe Memorial MasterCard en demi-finale. Les Mooseheads ont terminé la saison trois points devant les Foreurs au deuxième rang en saison régulière et avant de croiser les Foreurs, ils avaient gagné 21 de leurs 22 matchs précédents.

Les Foreurs étaient aussi alors au milieu d’une séquence heureuse, ayant remporté 15 de leurs 17 derniers matchs du calendrier régulier avant d’accumuler un dossier de 8-2 à leurs deux premières rondes des séries éliminatoires, notamment en éliminant les talentueux Voltigeurs de Drummondville en six matchs. En demi-finale, les Foreurs ont eu besoin de sept matchs pour écarter les Mooseheads.

« Chaque victoire nous a aussi fait gagner en confiance », affirme Durocher qui avait déjà remporté un titre de ligue à la barre des Tigres de Victoriaville en 2002. « Vous pouviez voir les gars croire au travail des uns et des autres de plus en plus et ils ont vraiment commencé à croire à ce que nous leur disions. Ils méritent beaucoup de crédit pour leur éthique de travail. »

Durocher a dit que l’élément le plus important dans le plan directeur a été quand ses joueurs ont compris l’approche en défensive. Il leur a répété et répété qu’ils ne gagneraient pas si tout ce qu’ils arrivaient à faire était de marquer des buts.

« Nous savions déjà que nous pouvions faire le travail à l’attaque », raconte Durocher. « Nous avions le meilleur jeu de puissance du circuit en saison régulière et notre équipe a marqué le plus grand nombre de buts. Cela n’est pas suffisant quand tu perds 8-7 ou 7-6. Nous voulions qu’ils continuent leur bon travail dans le territoire adverse, mais nous leur avons demandé plus d’engagement dans notre territoire. Ils devaient comprendre que tu peux jouer en défensive et encore marquer des buts, mais comme je le disais, ils ont travaillé dur à cet aspect du jeu et c’est la grande raison pourquoi nous sommes arrivés là où nous désirions nous retrouver. »

Ce titre est le troisième dans l’histoire du club de Val-d’Or. Les Foreurs ont aussi été champions en 1998 et en 2001, mais les résultats ont été plutôt maigres depuis. Ils n’avaient franchi la première ronde des séries qu’une fois entre 2004 et 2012.

« L’an dernier, nous avons remporté notre première série en quatre ou cinq ans et j’étais probablement le seul qui n’était pas satisfait de cela », raconte Durocher. « Nous parlions de la prochaine étape individuelle pour chaque joueur, mais aussi collectivement. Nous avons maintenant franchi cette étape. »

Willy Palov couvre les activités de la LHJMQ pour le Halifax Chronicle-Herald.